Si le café ne fait son entrée « officielle » en France qu’en 1669, il arrive à Marseille 25 ans plus tôt. Un négociant, de retour de Constantinople, en rapporte quelques grains : de quoi rendre très vite accros les Provençaux ! Petite histoire des Moments Café marseillais, du 17ème à nos jours…

Si les gens du Nord sont grands consommateurs de café (et pas seulement au cinéma dans « Bienvenue chez les Ch’tis »), c’est pourtant dans le Midi que le noir breuvage a fait sa première apparition, il y aura bientôt 370 ans…

 

Le goût de l’Orient

 

Dès 1644, les premiers grains de café font leur apparition à Marseille, dans les bagages de Pietro della Valle, un poète et aventurier italien (il identifia Babylone et fit connaître le café turc et les chats persans !), ou dans ceux du marchand Jean de la Roque (les avis diffèrent), qui tous deux s’en reviennent de l’Empire Ottoman. Ce qui est sûr, c’est que le Sieur de la Roque s’aménage chez lui un « cabinet à la turque », où il initie ses amis aux Moments Café. Il a en effet ramené de Constantinople « des tasses de vieille porcelaine et de petites serviettes de mousseline brodées d’or », ainsi que tous les ustensiles nécessaires à la préparation de sa boisson préférée. Le goût et la mode du café se répandent chez les commerçants marseillais, qui dès 1660 en font importer quelques balles. Peu à peu, on en boit dans tout le Midi de la France, et jusqu’à Lyon. En 1671, l’arménien Pascaly Haroukian ouvre le premier « magasin de liqueur de café » à Marseille : l’endroit deviendra vite le rendez-vous des négociants et des capitaines phocéens.

 

La bataille du café

 

Début 18ème, les importations de café vers la Hollande transitent toutes par Marseille. Mais alors que la concurrence avec d’autres ports (Venise et Gênes surtout) est rude, le Yémen et l’Empire Ottoman décident de limiter leurs exportations de café ; et les marins malouins reçoivent en 1707 l’autorisation du Roi d’armer deux vaisseaux pour faire « la traite du café » avec l’Arabie. Coup dur. Mais les Provençaux ne vont pas abandonner aussi facilement un breuvage qu’ils adorent et un commerce lucratif : en février 1730, un navire arrive à Marseille chargé de café en provenance des Antilles françaises ; deux ans plus tard, la ville obtient le « droit d’entrepôt » permettant la redistribution du café vers l’étranger. Le port redevient la plaque tournante du café pour toute l’Europe (notamment vers Amsterdam) : ouf, les Moments Café peuvent continuer !

 

Sang chaud et café fort

 

Dès 1679, les marchands de vin locaux, furieux de la concurrence du café sur leur commerce, avaient tenté de le faire interdire par la Faculté de Médecine, qui le déclara nocif pour les Marseillais « dont l’esprit n’est déjà que trop subtil et le sang brûlé ». En vain : si les gens du Sud ont peut-être le sang chaud, ils ont pris goût au café et n’ont jamais voulu y renoncer. A Marseille comme partout dans le Midi, on apprécie les Moments Café très corsés. Corsés… côté goût (influence de l’Italie oblige, on ne boit quasiment que des expressos très forts), comme côté ambiance. Partager un Moment Café, le matin ou en début d’après-midi, c’est inviter les voisins, discuter passionnément de l’actualité, jouer aux cartes... Pour la pétanque, on préfère une boisson plus anisée J !

 

 

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